Cette semaine, je rencontre Nuraly Turganbaev, fondateur d’EcoNomad. Cette agence d’écotourisme kirghize est reconnue par ses clients pour son sens de la clientèle, la qualité des tours proposés et son engagement pour la nature. J’ai rencontré Nuraly la semaine passée. Entre deux cours de Français – Nuraly est aussi professeur à l’Université de Bichkek – il a bien voulu lister les qualités qui, selon lui, distinguent un guide moyen d’un excellent guide. Mais d’abord, pour mieux comprendre le rôle d’un guide et les raisons d’en engager un, permettez-moi de vous présenter un scénario-type :
Les vacances approchent et les recherches vont bon train. Le choix de la
destination n’a pas encore été arrêté, vous faites face à un dilemme. Vous rêvez de
découvrir un pays à la nature flamboyante et à la culture riche, mais les cars de
touristes viendraient ruiner votre quête d’authenticité. Les lieux trop fréquentés ne
permettent plus de faire de vraies rencontres humaines. Dans trop de destinations,
l’appât du gain biaiserait l’authenticité des échanges entre les autochtones et
vous-même. Il y a bien quelques pays que vous rêvez secrètement de visiter : les
contrées de la Route de la Soie. Mais ces derniers ne jouissent pas d’une excellente
réputation : tensions de nature interne, jeu géopolitique, conditions de sécurité
précaires ou encore de manque de développement et corruption rampante. Vous
vous rappelez que si ces touristes que vous fuyez si farouchement n’y vont pas,
c’est parce que l’industrie touristique n’est pas encore suffisamment implantée
dans la région. Et vous avez certainement raison, les régions vierges de tourisme
de masse offrent peu d’options pour les étrangers en quête de découverte, qui
doivent parfois se transformer en Indiana Jones pour arriver à boucler leur
programme. Les inquiétudes noircissent alors la belle carte postale que vous aviez
en tête. Vous attendrez que la région se développe un peu plus, qu’elle soit plus
stable, qu’elle propose de meilleures conditions pour les touristes. Frustré(e) et un
peu déçu(e), vous finissez par réserver un séjour dans le même hôtel que l’année
passée, dans lequel vous êtes certain(e) que vous vous plairez.
Mais vous êtes passé(e) à côté d’un point capital ! Vous vouliez rencontrer des
gens, découvrir leur culture et leurs traditions, goûter à leur cuisine et vous
retrouver au plus près de leurs habitudes ? Qui dit absence de tourisme de masse,
dit tourisme sur mesure. Et c’est là que faire appel à un guide prend tout son sens.
Prenons l’exemple du Kirghizistan, pays dans lequel je me trouve actuellement.
Bien que ce pays soit exceptionnel, tant pour sa nature extrêmement diversifiée
que l’hospitalité de ses habitants, il tombe dans la catégorie des pays qui ne sont
pas encore prêts au tourisme de masse. Réseau routier limité, peu de trains, et une
administration peu intéressée par les langues étrangères. Dans cette région du
monde, si l’on veut découvrir un pays, on s’accompagne d’un ami qui connaît les
bons coins ou, à défaut, on loue les services d’un bon guide local. S’il est plutôt
rare d’avoir un ami qui vit dans ces pays, on peut en revanche trouver d’excellents
guides, aussi polyglottes que professionnels. Cependant, tout guide ne cumule pas
nécessairement ces qualités.
Voici donc, tirée de mon entretien avec Nuraly Turganbaev, une liste de qualités
cumulatives qui vous permettront de déterminer si vous avez affaire à un excellent
guide ou non :
Savoir établir un climat de confiance rapidement
Le premier contact est déterminant. Dès les premiers échanges par e-mail, vous
devez vous sentir à l’aise. Si l’on vous promet que le guide parle Français, vous
êtes en droit de vous attendre à planifier en Français avec lui, avant même votre
départ.
Une fois arrivé(e)s sur place, l’accueil est de la plus haute importance. La
ponctualité, le sourire, la bonne humeur et de petites attentions pour vous faire
oublier votre long voyage sont primordiales. On se fait un avis sur quelqu’un dans
les 20 secondes qui suivent la rencontre. De plus, le guide joue un rôle de
représentation du pays qu’il fait visiter. S’il veut promouvoir son propre métier, il
lui faut d’abord garder en tête qu’il veut donner envie aux touristes de parler de
son pays à leur retour. Une raison de plus de soigner sons sens de l’accueil et de
ne rien laisser au hasard pour la première rencontre.
Connaître la région visitée comme sa poche
Trop de guides improvisés sillonnent routes et pistes, pensant qu’il suffit
d’emmener leurs clients du point A au point B sans avoir la moindre idée de ce qui
se trouvent dans la région. La faune, la flore, la géologie, l’histoire du lieu visité
sont autant de curiosités que les clients seront avides de découvrir. Comme un
musée que vous visiteriez, 90% de votre intérêt serait perdu sans des explications
détaillées. Vérifiez bien que votre guide soit diplômé et qu’il soit passionné par son
métier. La différence entre une aventure extraordinaire et une visite ratée tient
parfois à ce simple détail.
Savoir faire preuve d’une patience à toute épreuve
Un excellent guide est un professionnel de l’accueil. Il se souvient qu’il a affaire à
des êtres humains, qui seront peut-être fatigués par le voyage, malades ou même
parfois se disputeront, avec lui ou entre eux. Dans ces circonstances, il sait rester
calme, de bonne humeur et désamorcer les conflits. Il mobilisera sa patience afin
de garder la tête froide et prendra du recul pour gérer un groupe qui connaîtra
forcément des hauts et des bas tout au long du périple.
Etre un excellent communicant
Comme vu dans le point précédent, il se peut que des tensions apparaissent. Pour
que le voyage reste un moment de convivialité et d’expériences positives pour le
groupe, le guide sait trouver les bons mots et les bons gestes. Il sait également
expliquer pourquoi il demande à ses clients de conserver leurs déchets jusqu’à la
prochaine poubelle, les informer des lois locales, et leur donner envie de découvrir
la prochaine destination.
Savoir anticiper et planifier
A propos de destination, le guide profite du repas du soir pour discuter du plan
pour le lendemain. Ce moment de convivialité est l’occasion d’avoir un retour sur
la journée passée et d’évaluer le moral de son groupe. En fonction de ce qu’il
entend, il décide de modifier ou non le programme du lendemain. Il connaît aussi
parfaitement les conditions météorologiques des lieux de visite, les habitants chez
qui il fera dormir ses clients et les points de ravitaillement. Ne rien laisser au hasard
est la meilleure façon d’assurer une qualité de service irréprochable.
Etre flexible et faire preuve de ressources
Même si presque tout aura été planifié et anticipé, un bon guide sait que le risque
zéro n’existe pas et qu’un changement de programme peut vite survenir. Une
météo capricieuse, un client malade ou blessé, un problème matériel ; un nombre
infini de petits ennuis peuvent venir contrarier les organisateurs les mieux
préparés. C’est là que flexibilité et débrouillardise deviennent extrêmement
importantes. Comment passer ce col enneigé alors que le véhicule n’avance plus à
cause du froid ? Qui appeler pour fournir une alternative au transport ? Un
excellent guide a la réponse à ces questions et saura sauver une situation mal
embarquée.
Faire passer le confort du client avant tout
Le client est roi. Au-delà de la somme d’argent que vous payez pour ses services,
un mécanisme plus complexe se cache derrière vos attentes. Rappelez-vous, vous
lui avez donné votre confiance, dans un pays que vous ne connaissez pas, dont
vous ne maîtrisez pas les codes ni la langue, pour qu’il vous permette d’oublier ces
obstacles qui, sans lui, vous auraient fait choisir un hôtel que vous connaissiez
déjà, ou un pays qui ne vous fait pas rêver. La sauvegarde de ce lien de confiance
est dans les seules mains du guide, qui ne doit jamais oublier ceci.
Livre d’or
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